(Selon un rapport de l'ingénieur en chef du Service des Mines, le personnel occupé durant les premiers mois de 1904 était de 534 ouvriers au fond et 361 au jour, soit un total de 895 ouvriers.)
Des bâtiments vidés de leurs machines.
Nombre d'ouvriers de la mine de Pontpéan
Nombre de personnes à la charge des mineurs résidant dans la commune
habitant la commune quand la mine était en pleine exploitation
au moment de la cessation des travaux
partis sans espoir de retour
résidant actuellement dans la commune
Le questionnaire de la préfecture
Pour évaluer les conséquences de la fermeture, la préfecture adresse un questionnaire aux six mairies du bassin d'emploi de la mine. Selon les déclarations faites par les maires, ce sont au total près de mille personnes qui vont se trouver sans travail :
À Rennes, le bruit court qu'une grave émeute se serait produite à la mine, à l'annonce de la fermeture. Les gendarmes de Bruz auraient même fait appel à des renforts pour réfréner de violentes manifestations. Un journaliste de l'Ouest-Éclair vient à Pont-Péan, tard dans la soirée du 8 août, pour se rendre compte de la situation. À sa grande surprise, tout est calme. Les rares personnes qu'il finit par rencontrer lui déclarent que les faits ont été démesurément grossis. Le matin, au moment de la paye, quelques ouvriers auraient seulement protesté et hué les représentants de Robert Forget en apprenant la fermeture. Les gendarmes n'auraient même pas eu à intervenir (ils sont pourtant venus en aide à Georges Delambre). Le 9 août, l'Ouest-Éclair titre "À la Mine de Pontpéan — Une émeute qui se réduit à rien".
Les uns après les autres, les bâtiments vont peu à peu disparaître du paysage et celui des bureaux est aujourd'hui l'un des derniers témoins de l'aventure industrielle de Pont-Péan.
Un abandon inévitable ?
Aussitôt après l'achat de la mine, le nouveau concessionnaire, Robert Forget, demande à M. Bronne, un ingénieur belge, de venir à Pont-Péan pour y dresser un rapport (probablement Georges Bronne, diplômé de l'université de Liège en 1892 et neveu de Joseph Bronne, l'ingénieur qui avait ouvert le puits du Midi en 1862). Ses conclusions ne sont guère encourageantes. "La mine de Pont-Péan a été gaspillée par des sociétés toujours plus pressées de prendre sous leurs pieds, le plus rapidement possible, le minerai qui s'y trouvait ; ce n'est plus qu'un trou au fond duquel on enfouirait des millions sans chance possible d'avenir". L'adjudication du 14 juin n'est pas encore définitive. Une surenchère dans les semaines suivant la vente reste possible. Robert Forget cherche donc une société qui accepterait de reprendre l'exploitation. Il s'en présente deux, qui renoncent après examen des dossiers et visites. Une proposition de location est faite à la Compagnie des Mines de Pontgibaud, dont les fonderies de Couëron traitent le minerai de Pont-Péan. Elle refuse aussi. Faute de repreneur, les pompes sont arrêtées le 8 août. Les machines sont ensuite démontées et vendues.
C'est ainsi que Robert Forget explique l'abandon de l'extraction. L'administration n'est pas convaincue par ses arguments. La Compagnie des Mines de Pontgibaud proteste contre l'inexploitation. Quand une concession minière n'est pas exploitée par son propriétaire, l'État la lui retire : le 14 juin 1905, la Société Transmission, Transport et Traction est déchue de la concession.
La vente du matériel
"Les ouvriers, énervés par la longue attente d'événements qui ne se produisent pas, sont paraît-il dans un état de surexcitation très grande et qui se conçoit. Ils montent, nous dit-on, la garde nuit et jour pour s'opposer à l'enlèvement des machines et autres matériaux d'exploitation."
(L'Ouest-Éclair — 23 août 1904)
Les machines seront pourtant bientôt démontées et mises en vente. Le matériel de lavage et de triage, racheté par Charles Jacques, partira en 1905 pour les mines de charbon de la Nondoué, en Nouvelle-Calédonie. D'autres machines iront au Transvaal.
Des centaines d'ouvriers sans travail
La mine reste sous surveillance. Dans son rapport du jeudi 18 août, le brigadier Mabire, commandant la brigade à pied de Bruz, consigne :
"Par suite du chômage de la mine de Pontpéan, 200 ouvriers environ sont actuellement sans travail ; ces ouvriers habitent les communes de Bruz, Saint-Erblon, Orgères, Chartres et Laillé. Vers la fin du mois de septembre prochain, alors que les travaux de la moisson seront terminés, le nombre des ouvriers sans travail pourra s’élever à 400. Actuellement 5 ou 6 employés comptables et liquidateurs travaillent pour le compte de l’ancienne société. Leur esprit est très bon.
Monsieur Forget, propriétaire de la mine, emploie 7 ou 8 personnes dont un garde particulier qui habite sur les lieux, deux gardes des portes d’entrée, un garde de nuit du matériel de l’embarcadère de Carcé et 3 ou 4 ouvriers occupés à mettre certains objets en place… Les outils, machines et matériels ne sont pas gardés mais les portes des ateliers et appartements renfermant le matériel sont fermées à clef. Le dépôt de dynamite est gardé par l’employé qui était chargé de ce service par l’ancienne société. Dans ce dépôt il existe 985 kg de dynamite. L’esprit de tous les ouvriers est bon, y compris ceux occupés actuellement et anciennement. Des troubles sérieux ne sont pas à craindre. Du moins l’on n’en prévoit pas jusqu’à présent."
Dans la marge du rapport, une annotation de Georges Delambre révèle une situation plus inquiétante :
"Ces chiffres sont inexacts d'après mes renseignements : 200 environ sont partis, 400 sont actuellement occupés et 400 environ sans travail. Au 29 septembre, fin de la moisson, même en comptant une centaine embauchés ailleurs, il y aura entre 600 et 700 mineurs sans travail."
L'arrêt des machines
Au matin du lundi 8 août 1904, la machine d'épuisement est arrêtée. On cesse de pomper l'eau du fond de la mine. C'est donc la fin... Georges Delambre et un ouvrier mécanicien, M. Kirstetter, sont maintenus dans un bureau par une cinquantaine d'ouvriers furieux et menaçants. Alertés par M. Robine, garde particulier à la mine, les gendarmes Collet et Chevet viennent les faire sortir, en exhortant les ouvriers au calme. Ils raccompagnent ensuite Georges Delambre à son hôtel de Rennes, sous les cris hostiles des ouvriers qui le poursuivent sur plusieurs kilomètres. Il reviendra dix jours plus tard, dans un climat plus serein.
L'annonce de l'abandon des travaux
Le 4 août 1904, Georges Delambre avise le Service des Mines qu'il vient de déclarer à la préfecture l'abandon imminent des travaux. Interrogé par un journaliste du Nouvelliste de Bretagne, Maurice Jeantet, l'ancien directeur, explique la situation :
"C'est vrai, la mine est arrêtée. M. Forget, qui est, comme vous savez, l'ingénieur mandataire de la Société de traction et de transmission de Paris, qui s'est rendue adjudicataire de Pontpéan, avait compté sur une combinaison financière qui permettrait de poursuivre l'exploitation. Cette combinaison n'ayant malheureusement pas réussi, il se trouve dans la nécessité d'arrêter les travaux et de vendre les vieux matériels et les ferrailles pour couvrir les frais d'acquisition.
Néanmoins, l'épuisement de la voie d'eau qui a envahi les galeries souterraines se poursuit comme par le passé, et cela jusqu'à l'arrivée des ingénieurs du gouvernement qui doivent, aux termes de la loi, visiter les exploitations de ce genre avant leur abandon définitif."
La visite a lieu deux jours plus tard, le samedi 6 août.