L'enlèvement des voies
Le matériel ferroviaire ainsi que quatre kilomètres de voies ferrées seront vendus en novembre 1933 à la Compagnie des Mines de l'Ouest. Cette vente comprendra "un embranchement particulier" avec la Compagnie des Chemins de Fer de l'État, à la gare de Bruz, et "un embranchement industriel" avec la Compagnie des Tramways à Vapeur d'Ille-et-Vilaine. Mais les voies ne seront plus utilisées et constitueront une gêne pour la circulation. Un arrêté préfectoral du 17 janvier 1936 ordonnera l'enlèvement de la voie reliant les usines à la gare de Bruz. Quant à la voie d'embranchement de Pont-Péan, elle sera vendue aux enchères en 1941.
Le tramway aux portes des usines
Après la Grande Guerre une voie métrique est construite entre les usines et la station de Pont-Péan, remplaçant la voie Decauville initiale. Le tramway vient alors deux fois par jour aux portes des usines. Chaque fois, il en repart chargé d'une quarantaine de tonnes de marchandises. Le raccordement à la ligne des T.I.V. va fonctionner durant une dizaine d'années.
Les installations de Bruz
Un grand bâtiment est construit près de la gare de Bruz. On y stocke le phosphate, les pyrites et les sacs d'engrais. Un vaste entonnoir est creusé dans une prairie voisine. Les wagonnets chargés des graviers de Pont-Péan y sont culbutés. Une chaîne à godets les récupère. Elle se décharge dans une grande trémie. L'ouverture d'une trappe laisse ensuite tomber les graviers dans les wagons des Chemins de Fer de l'État.
Après la guerre, le réseau à voie étroite est utilisé pour la reconstruction des régions dévastées. Il devient inutile en 1924, quand les routes sont redevenues praticables. Les locomotives et les voies sont alors revendues à l'industrie privée. La Kerr Stuart 2433 est acquise par la Société des Minerais et Produits Chimiques de Pontpéan.
La locomotive a 1,62 m de largeur. Elles est remplacée une dernière fois, en 1929, par un nouveau modèle d'une largeur de 1,80 m. La modification est autorisée à titre temporaire, à condition que la voie soit remblayée à partir du bourg de Bruz jusqu'au pont de Carcé, afin de permettre aux véhicules de se croiser.
Une locomotive Kerr Stuart de la classe Joffre.
La nouvelle locomotive est une Kerr Stuart de la "classe Joffre", construite en 1915 à Stoke-on-Trent et portant le numéro 2433. Dès les années 1880, en prévision d'un nouveau conflit avec l'Allemagne, l'armée française avait développé un réseau ferroviaire stratégique basé sur le système à voie étroite de Paul Decauville. Le réseau est renforcé durant la Grande Guerre pour ravitailler l'artillerie. Quand le gouvernement français demande l'assistance de l'industrie britannique, une série de locomotives à écartement de 0,60 m est contruite par Kerr, Stuart & Company Ltd. en 1915 et 1916. C'est la classe Joffre. Soixante-dix machines anglaises, identiques à la Decauville 030, sont alors débarquées à Nantes.
Les rails sont doublés dans la traversée du bourg de Bruz.
La Kerr Stuart 2433
En 1924, les voies initiales sont élargies à 0,60 m afin d'utiliser une locomotive à vapeur. À cette occasion, le conseil municipal de Bruz demande la mise en place de mesures de sécurité. Devant les maisons et à l'entrée des chemins et des champs, l'inter-rail devra être parfaitement nivelé. Dans tout le parcours de l'agglomération de Bruz, depuis la gendarmerie jusqu'à l'entrée du chemin des Landes, la voie devra avoir de doubles rails. De plus, des plaques seront placées de part et d'autre du pont de Carcé, informant les conducteurs qu'il est imprudent de franchir le pont en même temps que le train. Léon Delambre s'engage à entrenir la voie en parfait état, de façon à ne gêner ni la circulation sur les routes, ni les riverains.
L'arrêté précise que les convois n'auront pas plus de dix mètres de long, qu'ils ne pourront pas stationner sur la route et ne devront pas circuler de nuit. Ils ne pourront pas non plus traverser la route à une vitesse supérieure à celle d'un homme au pas et, à leur passage, un gardien assurera la sécurité de la circulation des voitures et des piétons.
Dès que la voie est construite, trois à huit convois transportent chaque jour les sacs d'engrais jusqu'au quai de la station des T.I.V.
Les usines reliées à la gare de Pont-Péan
Les Tramways d'Ille-et-Vilaine permettent de livrer facilement des marchandises dans tout le département. La société Delambre achète donc des terrains pour y poser une voie ferrée reliant les usines à la gare de Pont-Péan. La traversée de la route nationale nécessite une autorisation de la préfecture. Elle est accordée par un arrêté du 26 novembre 1915 :
"La Société des Minerais et Produits Chimiques de Pontpéan représentée par M. Delambre, administrateur délégué, est autorisée à établir en travers de la route nationale n°137, au point kilométrique 35k,960 commune de St-Erblon, une voie Decauville de 0m,50 de largeur destinée à relier l'usine de ladite Société avec la station Mines de Pontpéan du tramway à vapeur de Rennes au Grand-Fougeray..."
Des trains d'abord tractés par des chevaux
À ses débuts, pour recevoir les matières premières et expédier les engrais, la Société des Minerais et Produits Chimiques de Pontpéan utilise la petite voie ferrée reliant les usines à l'embarcadère de Carcé. Au mois d'août 1912, la société obtient l'autorisation d'installer une voie ferrée à écartement de 0,50 m partant de l'ancienne mine et aboutissant à la gare de Bruz. Une voie Decauville est posée sur une longueur de trois kilomètres. Elle emprunte le "chemin de grande communication n°36", franchit le pont de Carcé et traverse le bourg de Bruz. Les premiers wagons sont en bois. Ils sont tirés par les chevaux de la Métairie de la Clôture.
La traction animale montre immédiatement ses limites. La montée des côtes de Carcé et de l'arrivée à Bruz, ne peut se faire qu'en coupant les trains en deux… Les chevaux sont bientôt remplacés par des tracteurs à benzol.
Après une longue montée, des trains chargés de graviers et de sacs d'engrais passent devant la gendarmerie de Bruz, à gauche, avant de pénétrer dans le bourg.