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Mais la gloire t'appelle à de plus grands miracles
La puissance d'un art s'accroît par les obstacles.
C'est par eux qu'un Dieu sage, irritant nos efforts,
Nous enchaîne au travail, et nous vend ses trésors.
C'est ainsi que ses mains avares et fécondes
Ont caché sous la terre, en des mines profondes,
Cet or qui fait mouvoir et vivre les états,
Et le bronze et l'airain tonnant dans les combats,
L'acier qui fait tomber les sapins et les chênes,
Le fer qui de Cérès fertilise les plaines,
Et le métal enfin qui, docile à nos lois,
S'arrondit en canaux, ou s'étend sur nos toits.
L'Armorique long-temps, de ce métal utile,
Dans de vastes marais cacha l'amas stérile.
Tu parais : l'onde fuit, la terre ouvre son sein,
Et ne rend ses tributs qu'à ta puissante main.
Extrait de l'Épître à M. Laurent, chevalier de Saint-Michel (1761).
Un poème à la gloire de Pierre-Joseph Laurent
 

Avant d'être reçu à l'Académie française, Jacques Delille se fait connaître par quelques odes et, en 1761, par une "Épître à M. Laurent, chevalier de Saint-Michel, à l'occasion d'un bras artificiel qu'il a fait pour un soldat invalide". Il y décrit les nombreuses réalisations de Pierre-Joseph Laurent. L'assèchement de la mine de Pont-Péan pour en extraire le plomb, "ce métal utile", lui inspire quelques vers.
Le pont de Carcé
 





Un vieux pont de bois, dit "Pont de la Rabine de Carcé", enjambait le canal de Laurent. En 1857, il est remplacé par un ouvrage en pierre à deux arches.
Jacques Delille
(1738-1813)
Pierre-Joseph Laurent, mécanicien
 


Pierre-Joseph Laurent naît le 12 décembre 1713 à Boussières-sur-Sambre, dans le Hainaut français. En 1730, il succède à son père comme éclusier à Bouchain, mais il se tourne très vite vers les arts mécaniques. L'assèchement des marais de Flandre et du Hainaut lui vaut bientôt la direction des canaux de ces provinces.
Il s'illustre aussi par deux réalisations spectaculaires qui vont rapidement le faire connaître.
C'est d'abord l'invention d'une machine à contre-poids avec laquelle un homme peut lever, en six minutes, la grille qui ferme l'Escaut à Valenciennes, alors qu'il fallait auparavant "cinquante hommes et vingt-quatre heures".
Puis, en 1752, pour amener de Saint-Quentin à Valenciennes une statue en marbre de Louis XV, il fait construire un chariot porté par des rouleaux sans fin, que deux hommes peuvent conduire "au lieu de cent chevaux"…
Pierre-Joseph Laurent arrive à Pont-Péan en juillet 1754. Il parvient, en seize mois, à détourner la Seiche et à installer une machine permettant à la fois de pomper l'eau de la mine et de monter le minerai. Le 29 novembre 1755, il informe l'intendant, François-Xavier Le Bret, de son succès.
 
L'assèchement des mines de Pont-Péan est considéré comme un grand service rendu au royaume. En récompense, Louis XV anoblit Pierre-Joseph Laurent en août 1756. Six mois plus tard, il lui accorde le cordon de chevalier de l'ordre de Saint-Michel. Les machines hydrauliques du mécanicien de Bouchain vont être décrites et représentées dans l'Encyclopédie. L'argent gagné à Pont-Péan va lui permettre d'assurer sa fortune en accédant, en 1757, au capital d'une des premières grandes sociétés industrielles de France, la Compagnie des Mines de charbon d'Anzin.
 
Pierre-Joseph Laurent va encore accroître sa renommée avec son projet de canal souterrain reliant l'Escaut à la Somme. Il meurt à Paris le 12 octobre 1773, laissant une fortune considérable à sa fille Félicité et à son fils Pierre Charles, qui sera contrôleur général des finances en 1787 et secrétaire d'État de la maison du Roi en 1788.
La route de Pont-Péan à Bruz franchit un canal du XVIIIe siècle près du moulin de Carcé. C'est le canal de dérivation de la Seiche, dont le creusement constitue l'un des premiers grands travaux de Pierre-Joseph Laurent à Pont-Péan. Long de 1.500 m, large de 23 m, profond de 5 m, enserré entre deux levées de terre, le canal de Laurent éloigne la rivière de la mine.
Le canal de Laurent
 

Repoussée vers le Nord par Pierre-Joseph Laurent, la Seiche coule dans un nouveau lit depuis le milieu du XVIIIe siècle.
Pierre-Joseph Laurent
(1713-1773)
 
(Collection Henri de Vezins)
Cliquer pour voir le plan (cadastre de Bruz - 1812)

La dérivation de la Seiche