Un extrait du procès-verbal de la séance du 20 décembre 1740, rédigé par Bernard de Fontenelle. (Registres de l'Académie Royale des Sciences. Tome 59.)
La reconnaissance posthume des encyclopédistes
En 1747, l'éditeur André-François Le Breton confie à Denis Diderot et Jean Le Rond d'Alembert le soin de réaliser un dictionnaire universel et raisonné. Le premier volume de l'Encyclopédie, ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers paraît au mois de juin 1751. Il sera suivi de 16 autres volumes de texte et de 11 volumes de planches.
L'article "Hydraulique" est rédigé par Antoine-Joseph Dézallier d'Argenville. L'auteur y décrit "les plus belles machines de l'Europe pour élever les eaux" : neuf machines, parmi lesquelles figure la pompe exécutée par feu M. Dupuy pour l'épuisement des eaux de la mine de "Pompéan, près de la ville de Rennes". Elle est capable, précise-t-il, "d'amener dans le même espace de temps le double de l'eau que peut fournir la meilleure machine qui ait été exécutée jusqu'à présent". Les deux planches d'illustrations correspondantes sont publiées en 1767.
La dernière pompe de Claude-Thomas Dupuy.
(Recueil des machines & inventions approuvées par l'Académie Royale des Sciences, dessinées par Jean-Gaffin Gallon. Volume 7.)
Jean-Gaffin Gallon est un "ingénieur du roy", né à Brest le 23 août 1706 et mort à Coutances le 18 janvier 1775. À la demande de l'Académie Royale des Sciences, il établit un inventaire des machines et inventions qu'elle a approuvées depuis 1666, année de sa création par Colbert, jusqu'en 1754. L'ouvrage comporte sept volumes illustrés.
Le dernier volume est publié en 1777, deux ans après le décès de son auteur. On y voit la pompe de Claude-Thomas Dupuy, mise en mouvement par quatre hommes. Elle est composée de deux corps et élève l'eau par un tuyau (CD).
L'inventeur
Comme on lui refuse alors tout emploi, il se tourne vers les sciences et consacre les dernières années de sa vie à la construction de machines hydrauliques. En 1734, il fonde une société ayant pour objet "les entreprises de machines, pompes, tuyaux et moteurs pour l'élévation des eaux". Il réalise alors une machine dont on parle beaucoup dans Paris et dans la presse périodique. Avant d'être reconnue par l'Académie Royale des Sciences, l'invention suscite l'intérêt des concessionnaires de Pont-Péan. Ils proposent à Claude-Thomas Dupuy de venir en Bretagne pour y mettre sa machine à l'essai. Arrivé à Carcé en mai 1738, il y meurt en septembre. Dès l'annonce du décès, Madame Dupuy demande à "l'élève" de son mari, Antoine François de Genssane, de se rendre à Pont-Péan pour achever l'installation. En novembre, la machine est en place.
En 1740, Daniel Chocat de Grandmaison, inspecteur des travaux de la ville de Rennes, procède à l'examen des machines de la mine. Dans le procès-verbal qu'il rédige au château de Carcé, les 12 et 13 juillet, il observe que les pompes de feu M. Dupuy "ont été établies et ajustées dans leur perfection par le sieur Genssane".
De son vivant, Claude-Thomas Dupuy avait soumis une première pompe à l'Académie des Sciences, qui ne l'avait pas approuvée. En 1740, c'est Marie-Madeleine Lefouyn, son épouse, qui présente un nouveau mémoire à l'Académie. Elle y expose que son mari a laissé en mourant deux pompes de son invention. Elle croit "devoir à sa mémoire de faire connaître la seconde", qu'il estimait supérieure à celle que les commissaires de l'Académie avaient déjà observée. Le 6 décembre 1740, les commissaires examinent cette dernière invention. Ils jugent "que la pompe de M. Dupuy est très bonne, que son produit est au moins aussi grand que celui d'aucune pompe qui ait été présentée à l'Académie, qu'elle doit être estimée par sa simplicité et par l'avantage qu'elle a de pouvoir être établie partout à peu de frais, n'étant que de bois doublé de plomb".
L'intendant de la Nouvelle-France
Claude-Thomas Dupuy naît à Paris, probablement le 10 décembre 1678. Il débute comme avocat puis achète, en 1720, la charge de maître des Requêtes. Nommé intendant de la Nouvelle France le 23 novembre 1725, il part pour Québec en juin 1726 et occupe son poste à partir du 2 septembre. Il y fait preuve de compétence, mais ses ordonnances touchant les chemins et les cabarets le rendent impopulaire. Le gouverneur, Charles de Beauharnois, le juge prétentieux et insatiable d'honneurs. Les relations entre les deux hommes se dégradent rapidement. En décembre 1727, la mort de l'évêque de Québec, Monseigneur de Saint-Vallier, provoque le différend le plus grave. Le clergé et le gouverneur s'unissent contre l'intendant, que l'évêque défunt avait choisi comme exécuteur testamentaire. L'affaire mécontente la Cour. En 1728, Claude-Thomas Dupuy est rappelé en France.
Mort d'un artiste au château de Carcé
Le mercredi 17 septembre 1738, une nombreuse assemblée se presse dans la petite église paroissiale de Bruz pour assister aux obsèques de Claude-Thomas Dupuy. Il était un de ces inventeurs appelés à Pont-Péan pour "l'épuisement des eaux qui emplissent la mine", un de ces ingénieux spécialistes des arts mécaniques que l'on appelle alors les "artistes". Claude-Thomas Dupuy est mort deux jours plus tôt au château de Carcé.
Au XVIIIe siècle, les artistes accueillis à Carcé sont des hôtes de marque. Ils conçoivent et établissent à la mine de Pont-Péan des machines qui seront souvent approuvées par l'Académie Royale des Sciences, voire même citées en exemple, décrites et représentées dans l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert.