Mine de Poullaouen - Enfants laveurs aux grilles.
Les enfants de la mine de Poullaouen
En 1845, à la mine de Poullaouen dans le Finistère, les enfants sont, comme à Pont-Péan, affectés au lavage du minerai.
"Arrivé au jour, le minerai est boueux sans la moindre apparence métallique, et bien des passants le voient sans se douter qu'il contient des métaux précieux. Des voitures le transportent aux ateliers de préparation mécanique. Il est jeté d'abord sur une grille en fonte, où des enfants l'agitent sous des chutes d'eau qui le dépouillent de son enveloppe boueuse. Il passe ensuite entre les mains de petits minéralogistes de douze à quinze ans, qui examinent prestement un à un tous les morceaux dont la grosseur dépasse celle d'une noix. De là sortent huit produits nouveaux, classés suivant leur richesse et leur grosseur. Un seul est rejeté. Parmi les autres, les plus gros sont cassés, les plus menus sont criblés, chacun par des ouvriers spéciaux…"
(Revue "L'Illustration" - 1845)
Aux termes de la loi de 1841, on n'est un enfant que jusqu'à l'âge de 16 ans. Les inspections prescrites en 1853 ont pour but d'assurer l'exécution de cette loi organisant le travail des enfants. Est-ce par inadvertance que, dans ce brouillon du 29 avril 1853, le rapporteur écrit ici 18 ans et non 16 ?
Envoi de Marie-Yvonne Crépin (1941-2020),
professeur émérite d'Histoire du Droit de l'Université de Rennes.
Le texte de la loi de 1841 doit être affiché dans chaque atelier.
De nombreux enfants employés par John Hunt
La réouverture de la mine de Pont-Péan est créatrice d'emplois et John Hunt privilégie la main-d'œuvre locale. En 1850, plus de quatre-vingts personnes, hommes, femmes et enfants des environs, sont employées à la mine. Trois ans plus tard, le nombre d'ouvriers a dépassé les deux cents. L'exploitation souterraine vient à peine de reprendre et, en 1853, l'essentiel du travail s'effectue encore en surface. Les enfants, qui lavent et broient le minerai, représentent alors près du tiers du personnel. Avec le développement des travaux souterrains, les ouvriers adultes vont ensuite être de plus en plus nombreux et la proportion des enfants va fortement diminuer (en 1890, ils seront moins de trente, employés aux laveries, pour un nombre total d'ouvriers voisin du millier).
En 1853, le préfet d'Ille-et-Vilaine prescrit l'inspection de tous les établissements du département soumis au régime de la loi du 22 mars 1841, à la demande du Ministère de l'Intérieur. La situation constatée à Pont-Péan, à la fin du mois de mars, est jugée satisfaisante.
Soixante-deux enfants du pays
"L'exploitation nouvelle de la mine de plomb, d'argent, de zinc de Pont-Péan, commune de Bruz (arrondissement de Rennes), a donné du travail à la population des environs. Au nombre de ses deux cent et quelques ouvriers, elle occupe 62 enfants de 12 à 18 ans [?], appartenant aux familles du pays avec lesquelles ils demeurent."
Le rapport sur l'exécution de la loi de 1841 à Pont-Péan
Des journées de dix heures de travail effectif
"La journée de travail commence à 7 h 1/4 du matin et finit à 6 h 1/4 du soir. Une heure seulement est accordée pour le dîner. Le salaire des enfants est 0,30 F à 0,70 F par jour, suivant leur force ou plutôt suivant leur âge."
[Un adulte gagne en moyenne 1,25 F par jour.]
De bonnes mœurs
"La conduite morale des enfants ne laisse rien à désirer. Ils ont tous fait leur communion. Ils remplissent leurs devoirs religieux. Les jours de fêtes, qui sont des jours de repos, sont passés au sein de la famille."
Un bilan positif
"En somme tout est satisfaisant : le pays est heureux de posséder cette nouvelle exploitation dont l'administration prescrit préférer les habitants aux étrangers nomades."
Un travail au jour
"Leur santé est satisfaisante et il n'y a pas un seul malade. Les enfants sont généralement employés au lavage et au broyement du minerai, travail qui s'opère en plein air. Les seuls ateliers qui existent sont affectés à la menuiserie et à la forge."
Une instruction presque nulle
"Leur instruction est presque nulle, ils sont tous enfants de paysans qui ne s'occupent guère de leur procurer les bienfaits de l'enseignement, même élémentaire. J'ai appelé l'attention de M. le Maire de Bruz sur les conséquences de cet état de choses et je suis certain d'avoir été compris."
Le début d'une réglementation du travail des enfants
Un décret impérial du 3 janvier 1813 interdit de faire descendre dans les mines les enfants de moins de dix ans, mais cette première mesure de protection des enfants ne sera guère appliquée.
Le travail des enfants dans les manufactures, usines ou ateliers est d'abord réglementé par la loi du 22 mars 1841, qui énonce sous quelles conditions les enfants pourront être employés dans les établissements occupant plus de vingt ouvriers. Ils devront avoir au moins huit ans et, jusqu'à douze ans, ils ne travailleront pas plus de huit heures par jour en continuant à fréquenter une école. De douze à seize ans, si le maire atteste qu'ils ont reçu l'instruction primaire élémentaire, ils pourront être dispensés d'école et travailler douze heures par jour, entre cinq heures du matin et neuf heures du soir. Aucun enfant de moins de seize ans ne pourra être employé les dimanches et jours de fêtes.
Mais la loi de 1841 ne concerne pas le travail au fond des mines. Il faudra attendre la loi du 19 mai 1874 pour qu'aucun enfant ne soit, en principe, admis dans les travaux souterrains des mines avant l'âge de douze ans révolus, les filles et femmes ne pouvant y être admises.